AMNÉVILLE (AFP) - Deux enclos grillagés à l'écart du reste du zoo: à Amnéville (Moselle), les loups en fin de vie ont leur propre maison de retraite, où ils se reposent dans une tranquillité absolue, éloignés du bruit et de l'effervescence des visiteurs.
Deux fois par jour, des soigneurs leur apportent eau ou nourriture. Et s'occupent, au besoin, de leurs bobos éventuels. Pour le reste, les trois canidés, nés en captivité de deux meutes différentes, sont laissés dans une paix royale. Hors du temps, ils retrouvent leurs instincts naturels.
Le premier d'entre eux: la crainte de l'homme. A l'approche de visiteurs, "Chaussette", de race européenne, se met à trembler. Ses oreilles remuent. Ses pattes arrières flageolent. "C'est un vrai trouillard. Comme je suis soigneur, il me reconnaît. D'où son comportement", explique Nicolas Leroux, le directeur zoologique.
Dans l'enclos d'en face, entouré aux trois quarts par une palissade "pour ne pas que l'animal se sente encerclé par la forêt environnante", une grosse louve canadienne se recroqueville, la tête entre ses pattes, quand Nicolas survient. Son pelage blanc, trempé par la pluie, se hérisse.
Quand le soigneur lui tourne le dos, la louve se redresse, confiante. "C'est sûrement le plus timide des prédateurs à l'égard de l'Homme, parce qu'il a été le plus chassé. On jette des pierres aux loups depuis la préhistoire. Aujourd'hui, le simple fait de leur lancer de la nourriture leur fait peur", confirme Michel Louis, le fondateur du zoo.
Les contacts sont dès lors réduits au minimum. Tout stress inutile est évité à ces pensionnaires trois étoiles, à qui l'on a construit cabanes et terrains de jeu, faits de bûches et de branchages.
"C'est le principe de la retraite: la tranquillité, remarque Nicolas Leroux. Pendant quatorze ans, ils ont été présentés au public. Ils ont fourni leur effort."
Quatorze années marquées au départ par une reproduction effrénée. Douze louveteaux naissent en 1992, saturant le parc. Pour éviter une surpopulation, les mâles sont vasectomisés. La meute ne se régénère plus et vieillit progressivement.
"Or il est inconcevable de présenter ce genre d'animaux au public. Avoir des loups arthritiques ou aveugles, qui se cognent, est impossible. Les gens vont se dire: "pauvre animal. Il est malheureux dans le zoo+. Alors qu'il est seulement vieux", analyse Michel Louis.
En septembre 2003, une nouvelle horde arrive à Amnéville. Les meutes ne pouvant se mélanger, sous peine de combats mortels, les plus anciens tirent leur révérence, direction la maison de repos.
"Cela répond à un principe général: pour nous, il est hors de question d'euthanasier un animal parce qu'il est trop vieux ou qu'il prend de la place. On ne le fait que quand il souffre", affirme Michel Louis, également directeur du zoo.
Choyés, les loups s'éteignent à des âges pharaoniques. En milieu sauvage, leur espérance de vie n'excède pas les huit ans. A Amnéville, ils meurent généralement vers leur quinzième printemps.
Alors... à votre avis... vaut-il mieux vivre huit ans en liberté... ou quinze ans en captivité...?